"Budget des armées, des renoncements majeurs sur fond de démission" par Roland Pietrini (Athéna Défense)
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jean-paul- Fondateur et Administrateur
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"Budget des armées, des renoncements majeurs sur fond de démission" par Roland Pietrini (Athéna Défense)
Il y a lieu de s’inquiéter !
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Budget des armées: renoncements majeurs sur fond de dém
Budget des armées, des renoncements majeurs sur fond de démission...et on commence à connaître
les vraies raisons du départ du CEMA..........
Contrairement à l’Assemblée nationale, le Sénat n’a pas accordé sa confiance à la poursuite de la LPM (loi de programmation militaire) 2019-2025.
Le quinquennat de Monsieur Macron s’achève donc, dans le domaine de la défense, dans la confusion et sur une nouvelle démission d’un Chef d’Etat-major des Armées qui semblait jusqu’alors se réjouir de la tenue d’un budget qui respectait pour la première fois depuis 20 ans les objectifs fixés par la loi de programmation.
Or, celle-ci, en réalité, souffre de nombreux aléas et reporte après 2025 l’essentiel des efforts, c’est à dire, et ce n’est pas un hasard, après l’élection présidentielle de 2022.
Par ailleurs, la « gouvernance » de la ministre des armées, simple porte-voix du chef de l’Etat, est marquée par un autoritarisme sans précédent. Si l’autorité est une valeur lorsqu’elle est autorité de compétence, l’autoritarisme est un système qui pour survivre est condamné à mettre au silence les contradicteurs.
Lorsqu’on a des d’arguments faibles, on attaque plus facilement le messager que le message qu’il porte.
Les faits sont têtus. Le bruit court que la décision de retrait partiel du Mali a été prise sans que le général Lecointre, chef d’état-major des Armées, en ait été informé au préalable. Par ailleurs, l’épisode de la tribune dite des généraux et les réactions outrancières qui ont suivi, a laissé des traces.
Si cela devait se confirmer, alors, nous aurions un exemple de plus du mépris de ce pourvoir envers ses plus fidèles serviteurs.
Par ailleurs, le non-respect de l’article 7 de la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense (LPM 2019-2025) prévoyait expressément qu’elle ferait « l’objet d’actualisations, dont l’une sera mise en œuvre avant la fin de l’année 2021 ». Cette disposition, issue du texte initial du projet de loi, correspondait à un engagement du Gouvernement qui ne sera pas tenu. C’est une forme de trahison. Ceci ajouté au fait que le plan de relance n’a quasiment pas concerné les Armées démontre, en dépit des apparences, que la politique menée en faveur de notre défense continue à subir des fluctuations négatives.
Le tableau, ci-dessous, intitulé écart entre l’actualisation et la cible, montre que d’ores et déjà des cibles de programmation ne seront pas atteintes en 2025.
Pire, aucune de nos faiblesses capacitaires ne pourra être comblée à l’horizon 2030, notamment dans les domaines des appuis, de la logistique, de l’artillerie, de la défense sol-air totalement sacrifiée, de l’absence de conception d’un engin blindé chenillé indispensable à l’accompagnement des chars. Ces capacités ne sont même pas évoquées.
Pour la Marine, la commande avancée d’une FDI (1) ne traduit en réalité que le désastre de la réduction du nombre de FREMM. Quant à l’AAE, notre capacité de projection et de combat est sensiblement diminuée, nos escadres équipées de Rafale étant devenues le réservoir à exportation pour des pays qui n’auraient pu, sans la garantie de l’état français, financer de telles acquisitions.
FDI frégates de défense et d’intervention.
Le surcoût de ce choix pour le budget défense est bien réel. Il est estimé par les sénateurs à 960 millions. Mais, en réalité, le surcoût estimé pour atteindre les objectifs de la LPM se chiffrent déjà à 8 milliards 600 millions. Le bilan du président Macron est du même niveau que celui de ses prédécesseurs. Mais Florence Parly signale que la commande d’une troisième frégate de défense et d’intervention pour 750 M€, seul mouvement « positif » consigné par les sénateurs, n’est pas à considérer comme un surcoût mais comme l’anticipation d’un achat déjà fixé dans le périmètre de la LPM. Pas un mot cependant sur les décalages de livraison, pourtant a priori confirmés et l’oubli d’une commande de 12 Rafale afin de compenser ceux d’occasion cédés à la Croatie !
Bref, ce n’est pas après moi le déluge, mais avec ou sans moi l’assurance de notre déclin et l’affirmation de notre faiblesse.
Par ailleurs, les choix dogmatiques, censés renforcer l’Europe de la défense, qui se traduisent par une coopération renforcée avec l’Allemagne concernant les deux projets majeurs le SCAF et le MGCS dépendent en réalité du bon vouloir du Bundestag. Notre politique de défense est liée désormais à celle de l’Allemagne, ce qui met en péril notre sécurité future. Le dogmatisme pour une Europe de la défense sans discernement fera des ravages dans des domaines où nous avons de très hautes compétences.
Or lors de sa dernière audition au Sénat en tant que Chef d'Etat-major des Armées, le général Lecointre déclare: « Nous cherchons actuellement à éviter une coopération étendue tous azimuts à des partenaires notamment tchèques, polonais ou autres, avant d’avoir réussi à bien construire le partenariat franco-allemand » et « Nous sommes soumis à des impératifs industriels de notre partenaire allemand ». Cette lucidité est à saluer, est-elle l’un des éléments qui l’a mené aussi à présenter sa démission ?
La loi de programmation sera, comme toutes les autres lois de programmation, non respectée. « Seules les 5 premières annuités de 2019 à 2023 ont été votées pour un montant global de 197,8 Mds €, renvoyant les 2 dernières annuités 2024-2025 à un arbitrage ultérieur prenant en compte la situation macroéconomique à la date de l’actualisation et l’objectif de porter l’effort de défense à 2 % du PIB en 2025 ». Or, cette situation macroéconomique justifiera une fois de plus tous les ajustements et renoncements. (avec une chute du PIB de 8% en 2020, nous avons, d’ores et déjà, atteints les 2%)
Cet état de fait, que j’avais dénoncé dès 2019 traduit en réalité la mauvaise foi de nos gouvernants et leur inconsistance.
Le prochain chef de l’Etat aura une responsabilité majeure pour réparer l’outil défense dans la perspective désormais possible d’un conflit de haute intensité pour lequel nous sommes dans l’impréparation absolue. Et dans l’hypothèse où Monsieur Macron serait réélu, compte tenu du bilan de son premier mandat, il ne fera qu’aggraver les manquements du premier.
L’exécution de la LPM n’est conforme qu’en apparence.
Il faut changer de paradigme. (2) Les échecs de la programmation militaire depuis une quinzaine d’année devraient nous faire réfléchir, nous avons une armée de façade, sans réelle capacité offensive de haut niveau, sans capacité de résilience et sous-équipée.
Une armée comparable à celle de 1870, (3) qui ; jusqu’en 1866, était considérée comme la plus forte d’Europe. Elle avait achevé la conquête de l’Algérie, battu l’armée russe en Crimée et pris Sébastopol, gagné la guerre de libération de l’Italie septentrionale contre les Autrichiens en 1859. Engagée de 1862 à 1867 dans la stérile et inutile expédition du Mexique.
Cela donnait aux Français un sentiment de supériorité évidente, mais nos grands chefs avaient oublié qu’en Europe les conflits pouvaient être différents. Alors que toute l’Europe recréait une armée de conscription, le système français, toujours régi par la loi de 1832, ne prévoyait pas le service militaire obligatoire. Il organisait en fait une armée de métier, composée de volontaires, complétés par des hommes du contingent. L’organisation militaire de l’Allemagne était, elle, supérieure à celle de la France. Tous les corps d’armée étaient constitués dès le temps de paix. Ce n’était pas le cas de la France.
Aujourd’hui nos régiments ne possèdent pas la totalité de leurs matériels ; ceux-ci sont en majorité stockés. Pour les régiments de chars, par exemple, cela est un non-sens, l’équipage a besoin de s’identifier à un char, le connaitre, l’entretenir, le bichonner, l’apprivoiser, nous risquerions de le payer très cher si nous devions nous engager dans un conflit. Cet exemple, parmi tant d’autres, démontre que nous avons aujourd’hui une armée expéditionnaire sans capacité de résilience, une armée où l’on puise de ci de là des hommes pour les projeter, dans des conflits de basse intensité qui tuent, qui nous épuisent, mais qui ne sont rien par rapport à ceux qui eurent lieu en Géorgie, au Donbass, au haut Karabakh…
Nous aurions aujourd’hui bien du mal à projeter en Europe, ne serait-ce qu’une brigade blindée complète, alors qu’elle est sous-appuyée, sous-protégée en moyen sol air, incapable de franchir des coupures sous le feu, sans munitions rodeuses, sans drones terrestres armées, avec une aviation qui risque de perdre très vite sa supériorité aérienne supposée.
Quant aux alliés européens, ils sont tout autant démunis. Reste l’Otan sous commandement américain, au mieux, nous ne serions comme dans la guerre du golfe avec nos 40 AMX30B2, et encore avec une réelle DAM à l’époque, que des supplétifs, contraints de demander des moyens supplémentaires à nos alliés….
L’armée de terre française c’est 140 Leclerc en ligne, 500 VBCI, à peine mieux armés que des BTR 70 des années 80 et en 2025, 150 blindés de reconnaissance Jaguar, 109 pièces d’artillerie et 67 hélicoptères Tigre en parc. De quoi équiper à peine sérieusement deux brigades blindée type OTAN, mais incomparablement sous-équipée par comparaison avec une brigade étalon de type russe.
À titre de comparaison l'Algérie possède 572 T90, 550 T 72, 300 BMP-T, 14 brigades S300... Certes l'Algérie n'a pas l'intention d'envahir la France militairement, elle a une autre stratégie bien plus efficace. Mais lorsqu'on veut siéger efficacement au conseil de sécurité, parler au nom de l'Europe, orienter la politique de l'OTAN, la moindre des choses est de mettre en adéquation ses désirs avec les réalités. La puissance repose sur la réalité de sa puissance, pas sur ses fantasmes. La faillite de notre diplomatie repose sur cet état de fait, l'illusion de puissance est la traduction de sa propre impuissance.
Le constat est le même pour la Marine sous équipée et l'Armée de l'Air et de l'Espace sous-calibrée en raison du contrat opérationnel.
La confusion entre la stratégie, la technique et la programmation est un mal bien français.
La revue stratégique doit décrire une état des lieux à la fois des menaces et des objectifs a atteindre dans les grandes lignes pour y répondre à court et moyen terme et devrait être menée par un organisme indépendant composé d’experts en économie, en géopolitique, en spécialistes des affaires industrielles et sociales et devrait inclure des parlementaires, des militaires, des diplomates et des sociologues, afin de déterminer quel effort la nation doit consentir en raison des menaces. Elle doit s’inscrire dans une réflexion sur le moyen et le long terme.
Le Livre blanc devrait être rédigé par un autre comité d’experts composé en majorité d’hommes et de femmes de l’art, afin de répondre aux constats posés par la première, en définissant les moyens nécessaires aux Armées en hommes et en équipement afin de contrer les menaces tant intérieures qu’extérieures compte tenu de notre volonté à la fois de défendre notre Nation dans l’ensemble de son implication régalienne dans le monde et dans le respect de nos accords.
Enfin, la programmation devrait être, après arbitrages politiques un cadre contraignant de mesures, sur lesquels le parlement ne pourrait revenir, et pour cela peut-être qu’une modification de la constitution serait nécessaire.
C’est à ce prix que nous reconstruirons un état- puissance et redonnerons à nos citoyens le sentiment d’être protégés afin de faire Nation.
Le Sénat, qui dans notre constitution ne peut avoir le dernier mot, constate et recommande sans capacité à modifier les effets d’une gestion insincère.
Je crains que la prochaine mandature, sauf en raison d’une crise majeure mettant en danger notre intégrité même, ne transgresse une nouvelle fois l’impérieuse nécessité de s’engager vers une réelle montée en puissance de notre défense dont le volet intérieur ne saurait être négligé.
La politique et la stratégie de la guerre ne sont qu'une perpétuelle concurrence entre le bon sens et l'erreur. Charles De Gaulle
Roland Pietrini
(1) FDI : Les frégates de défense et d’intervention, ou FDI, sont de futures frégates de premier rang de la marine nationale française, d'un déplacement unitaire de 4 460 tonnes à pleine charge2. Le programme porte sur cinq exemplaires, dont le premier doit être livré en 2024. Les frégates sont construites à Lorient par la société Naval Group.
(2) Armées : et si on changeait de paradigme ? - Défense actualités geopolitique (athena-vostok.com)
(3) LES RESPONSABILITÉS DE LA DÉFAITE MILITAIRE DE 1870 Les responsabilités de la défaite militaire de 1870 - napoleon.org
Source de l’article : le rapport d’information L’ACTUALISATION DE LA LOI DE PROGRAMMATION MILITAIRE 2019-2025 du Sénat. Essentiel (senat.fr)
Plus à lire :
Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]
Christian CHASSAGNE
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Contrairement à l’Assemblée nationale, le Sénat n’a pas accordé sa confiance à la poursuite de la LPM (loi de programmation militaire) 2019-2025.
Le quinquennat de Monsieur Macron s’achève donc, dans le domaine de la défense, dans la confusion et sur une nouvelle démission d’un Chef d’Etat-major des Armées qui semblait jusqu’alors se réjouir de la tenue d’un budget qui respectait pour la première fois depuis 20 ans les objectifs fixés par la loi de programmation.
Or, celle-ci, en réalité, souffre de nombreux aléas et reporte après 2025 l’essentiel des efforts, c’est à dire, et ce n’est pas un hasard, après l’élection présidentielle de 2022.
Par ailleurs, la « gouvernance » de la ministre des armées, simple porte-voix du chef de l’Etat, est marquée par un autoritarisme sans précédent. Si l’autorité est une valeur lorsqu’elle est autorité de compétence, l’autoritarisme est un système qui pour survivre est condamné à mettre au silence les contradicteurs.
Lorsqu’on a des d’arguments faibles, on attaque plus facilement le messager que le message qu’il porte.
Les faits sont têtus. Le bruit court que la décision de retrait partiel du Mali a été prise sans que le général Lecointre, chef d’état-major des Armées, en ait été informé au préalable. Par ailleurs, l’épisode de la tribune dite des généraux et les réactions outrancières qui ont suivi, a laissé des traces.
Si cela devait se confirmer, alors, nous aurions un exemple de plus du mépris de ce pourvoir envers ses plus fidèles serviteurs.
Par ailleurs, le non-respect de l’article 7 de la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense (LPM 2019-2025) prévoyait expressément qu’elle ferait « l’objet d’actualisations, dont l’une sera mise en œuvre avant la fin de l’année 2021 ». Cette disposition, issue du texte initial du projet de loi, correspondait à un engagement du Gouvernement qui ne sera pas tenu. C’est une forme de trahison. Ceci ajouté au fait que le plan de relance n’a quasiment pas concerné les Armées démontre, en dépit des apparences, que la politique menée en faveur de notre défense continue à subir des fluctuations négatives.
Le tableau, ci-dessous, intitulé écart entre l’actualisation et la cible, montre que d’ores et déjà des cibles de programmation ne seront pas atteintes en 2025.
Pire, aucune de nos faiblesses capacitaires ne pourra être comblée à l’horizon 2030, notamment dans les domaines des appuis, de la logistique, de l’artillerie, de la défense sol-air totalement sacrifiée, de l’absence de conception d’un engin blindé chenillé indispensable à l’accompagnement des chars. Ces capacités ne sont même pas évoquées.
Pour la Marine, la commande avancée d’une FDI (1) ne traduit en réalité que le désastre de la réduction du nombre de FREMM. Quant à l’AAE, notre capacité de projection et de combat est sensiblement diminuée, nos escadres équipées de Rafale étant devenues le réservoir à exportation pour des pays qui n’auraient pu, sans la garantie de l’état français, financer de telles acquisitions.
FDI frégates de défense et d’intervention.
Le surcoût de ce choix pour le budget défense est bien réel. Il est estimé par les sénateurs à 960 millions. Mais, en réalité, le surcoût estimé pour atteindre les objectifs de la LPM se chiffrent déjà à 8 milliards 600 millions. Le bilan du président Macron est du même niveau que celui de ses prédécesseurs. Mais Florence Parly signale que la commande d’une troisième frégate de défense et d’intervention pour 750 M€, seul mouvement « positif » consigné par les sénateurs, n’est pas à considérer comme un surcoût mais comme l’anticipation d’un achat déjà fixé dans le périmètre de la LPM. Pas un mot cependant sur les décalages de livraison, pourtant a priori confirmés et l’oubli d’une commande de 12 Rafale afin de compenser ceux d’occasion cédés à la Croatie !
Bref, ce n’est pas après moi le déluge, mais avec ou sans moi l’assurance de notre déclin et l’affirmation de notre faiblesse.
Par ailleurs, les choix dogmatiques, censés renforcer l’Europe de la défense, qui se traduisent par une coopération renforcée avec l’Allemagne concernant les deux projets majeurs le SCAF et le MGCS dépendent en réalité du bon vouloir du Bundestag. Notre politique de défense est liée désormais à celle de l’Allemagne, ce qui met en péril notre sécurité future. Le dogmatisme pour une Europe de la défense sans discernement fera des ravages dans des domaines où nous avons de très hautes compétences.
Or lors de sa dernière audition au Sénat en tant que Chef d'Etat-major des Armées, le général Lecointre déclare: « Nous cherchons actuellement à éviter une coopération étendue tous azimuts à des partenaires notamment tchèques, polonais ou autres, avant d’avoir réussi à bien construire le partenariat franco-allemand » et « Nous sommes soumis à des impératifs industriels de notre partenaire allemand ». Cette lucidité est à saluer, est-elle l’un des éléments qui l’a mené aussi à présenter sa démission ?
La loi de programmation sera, comme toutes les autres lois de programmation, non respectée. « Seules les 5 premières annuités de 2019 à 2023 ont été votées pour un montant global de 197,8 Mds €, renvoyant les 2 dernières annuités 2024-2025 à un arbitrage ultérieur prenant en compte la situation macroéconomique à la date de l’actualisation et l’objectif de porter l’effort de défense à 2 % du PIB en 2025 ». Or, cette situation macroéconomique justifiera une fois de plus tous les ajustements et renoncements. (avec une chute du PIB de 8% en 2020, nous avons, d’ores et déjà, atteints les 2%)
Cet état de fait, que j’avais dénoncé dès 2019 traduit en réalité la mauvaise foi de nos gouvernants et leur inconsistance.
Le prochain chef de l’Etat aura une responsabilité majeure pour réparer l’outil défense dans la perspective désormais possible d’un conflit de haute intensité pour lequel nous sommes dans l’impréparation absolue. Et dans l’hypothèse où Monsieur Macron serait réélu, compte tenu du bilan de son premier mandat, il ne fera qu’aggraver les manquements du premier.
L’exécution de la LPM n’est conforme qu’en apparence.
Il faut changer de paradigme. (2) Les échecs de la programmation militaire depuis une quinzaine d’année devraient nous faire réfléchir, nous avons une armée de façade, sans réelle capacité offensive de haut niveau, sans capacité de résilience et sous-équipée.
Une armée comparable à celle de 1870, (3) qui ; jusqu’en 1866, était considérée comme la plus forte d’Europe. Elle avait achevé la conquête de l’Algérie, battu l’armée russe en Crimée et pris Sébastopol, gagné la guerre de libération de l’Italie septentrionale contre les Autrichiens en 1859. Engagée de 1862 à 1867 dans la stérile et inutile expédition du Mexique.
Cela donnait aux Français un sentiment de supériorité évidente, mais nos grands chefs avaient oublié qu’en Europe les conflits pouvaient être différents. Alors que toute l’Europe recréait une armée de conscription, le système français, toujours régi par la loi de 1832, ne prévoyait pas le service militaire obligatoire. Il organisait en fait une armée de métier, composée de volontaires, complétés par des hommes du contingent. L’organisation militaire de l’Allemagne était, elle, supérieure à celle de la France. Tous les corps d’armée étaient constitués dès le temps de paix. Ce n’était pas le cas de la France.
Aujourd’hui nos régiments ne possèdent pas la totalité de leurs matériels ; ceux-ci sont en majorité stockés. Pour les régiments de chars, par exemple, cela est un non-sens, l’équipage a besoin de s’identifier à un char, le connaitre, l’entretenir, le bichonner, l’apprivoiser, nous risquerions de le payer très cher si nous devions nous engager dans un conflit. Cet exemple, parmi tant d’autres, démontre que nous avons aujourd’hui une armée expéditionnaire sans capacité de résilience, une armée où l’on puise de ci de là des hommes pour les projeter, dans des conflits de basse intensité qui tuent, qui nous épuisent, mais qui ne sont rien par rapport à ceux qui eurent lieu en Géorgie, au Donbass, au haut Karabakh…
Nous aurions aujourd’hui bien du mal à projeter en Europe, ne serait-ce qu’une brigade blindée complète, alors qu’elle est sous-appuyée, sous-protégée en moyen sol air, incapable de franchir des coupures sous le feu, sans munitions rodeuses, sans drones terrestres armées, avec une aviation qui risque de perdre très vite sa supériorité aérienne supposée.
Quant aux alliés européens, ils sont tout autant démunis. Reste l’Otan sous commandement américain, au mieux, nous ne serions comme dans la guerre du golfe avec nos 40 AMX30B2, et encore avec une réelle DAM à l’époque, que des supplétifs, contraints de demander des moyens supplémentaires à nos alliés….
L’armée de terre française c’est 140 Leclerc en ligne, 500 VBCI, à peine mieux armés que des BTR 70 des années 80 et en 2025, 150 blindés de reconnaissance Jaguar, 109 pièces d’artillerie et 67 hélicoptères Tigre en parc. De quoi équiper à peine sérieusement deux brigades blindée type OTAN, mais incomparablement sous-équipée par comparaison avec une brigade étalon de type russe.
À titre de comparaison l'Algérie possède 572 T90, 550 T 72, 300 BMP-T, 14 brigades S300... Certes l'Algérie n'a pas l'intention d'envahir la France militairement, elle a une autre stratégie bien plus efficace. Mais lorsqu'on veut siéger efficacement au conseil de sécurité, parler au nom de l'Europe, orienter la politique de l'OTAN, la moindre des choses est de mettre en adéquation ses désirs avec les réalités. La puissance repose sur la réalité de sa puissance, pas sur ses fantasmes. La faillite de notre diplomatie repose sur cet état de fait, l'illusion de puissance est la traduction de sa propre impuissance.
Le constat est le même pour la Marine sous équipée et l'Armée de l'Air et de l'Espace sous-calibrée en raison du contrat opérationnel.
La confusion entre la stratégie, la technique et la programmation est un mal bien français.
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Le Livre blanc devrait être rédigé par un autre comité d’experts composé en majorité d’hommes et de femmes de l’art, afin de répondre aux constats posés par la première, en définissant les moyens nécessaires aux Armées en hommes et en équipement afin de contrer les menaces tant intérieures qu’extérieures compte tenu de notre volonté à la fois de défendre notre Nation dans l’ensemble de son implication régalienne dans le monde et dans le respect de nos accords.
Enfin, la programmation devrait être, après arbitrages politiques un cadre contraignant de mesures, sur lesquels le parlement ne pourrait revenir, et pour cela peut-être qu’une modification de la constitution serait nécessaire.
C’est à ce prix que nous reconstruirons un état- puissance et redonnerons à nos citoyens le sentiment d’être protégés afin de faire Nation.
Le Sénat, qui dans notre constitution ne peut avoir le dernier mot, constate et recommande sans capacité à modifier les effets d’une gestion insincère.
Je crains que la prochaine mandature, sauf en raison d’une crise majeure mettant en danger notre intégrité même, ne transgresse une nouvelle fois l’impérieuse nécessité de s’engager vers une réelle montée en puissance de notre défense dont le volet intérieur ne saurait être négligé.
La politique et la stratégie de la guerre ne sont qu'une perpétuelle concurrence entre le bon sens et l'erreur. Charles De Gaulle
Roland Pietrini
(1) FDI : Les frégates de défense et d’intervention, ou FDI, sont de futures frégates de premier rang de la marine nationale française, d'un déplacement unitaire de 4 460 tonnes à pleine charge2. Le programme porte sur cinq exemplaires, dont le premier doit être livré en 2024. Les frégates sont construites à Lorient par la société Naval Group.
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